La vue mer
Sur la Côte d’Azur, le panorama Méditerranée représente entre 30 et 40 % de la valeur d’un bien immobilier. De Cannes à Roquebrune-Cap-Martin, des cités du littoral aux villages perchés, on ne compte plus les tableaux lui octroyant le rôle principal. Tour d’horizon…
Après les caps, c’est à la vue mer que revient la faveur de la clientèle internationale et fortunée. Elle parcourt des milliers de kilomètres pour apercevoir la Méditerranée et lui accorde la première place parmi les critères de sélection d’une résidence secondaire. « Russes et ressortissants des pays d’Europe de l’Est fondent littéralement pour le bassin cannois et plus particulièrement pour la « Ceinture d’Or », qui s’étend de La Croisette au Chemin des Collines en passant par La Californie et la Corniche du Paradis », introduit Jean-François Favelier, co-fondateur avec Maria-Anna Burger et gérant du groupe Burger Sotheby’s International Realty. Depuis les quartiers ultra-prisés de la Cité des Festival, on contemple à loisir la baie de Cannes, les îles de Lérins et le massif de l’Estérel. Les appartements des résidences avec piscine de La Californie oscillent entre 8000 et 15.000 €/m2. Le collectif luxueux de La Croisette peut atteindre 20.000-30.000 €/m2. Les intéressés, davantage enclins aux grandes surfaces, se heurtent à la pénurie de produits. Sur la Corniche du Paradis, les villas s’échelonnent, en majorité, de 4 à 6 M €, une somme pour laquelle on obtient 300 m2 habitables sur une petite parcelle. On dépasse rarement les 20 M €, un budget correspondant à plus de 500 m2 sur 5000 m2 et au-delà. Certaines propriétés, dont le Palais Oriental, le Palais Florentin, Bagatelle et La Tropicale, voient leur coût s’envoler véritablement. Le Cannet et l’avenue Victoria bénéficient de magnifiques plongées. L’individuel de bonne facture démarre à 2,5 M €. Délaissés par les locaux et plébiscités par les étrangers, La Croix-des-Gardes, l’avenue Jean de Noailles et le boulevard Leader s’ouvrent sur le Suquet, les espaces verts et les plages. De beaux spécimens ponctuent le site. Le ticket d’entrée avoisine 2 M €. Super-Cannes s’épanouit sur la commune éponyme, mais aussi sur Vallauris et Golfe-Juan. Les acquéreurs, prêts à débourser entre 2 et 2,5 M €, apprécient le cadre paisible. D’autant qu’ici, les barèmes n’ont pas augmenté dans les mêmes proportions. Quelques amateurs de vues bleutées, prennent la direction du versant sud de Courteline, situé à Mougins. Au nom du décor, ils oublient les nuisances sonores et la pénétrante qui s’invite parfois dans le champ de vision. Prévoir 2,5-4 M €, 5-6 M € quand la villa ne donne pas sur la route et bénéficie d’un environnement calme. Les connaisseurs préfèrent la demi-saison par temps de mistral, une condition requise pour un visuel pur et spectaculaire. Nul besoin de s’en approcher pour bien la regarder : 14 km séparent Tourrettes-sur-Loup de la mer. Pourtant, elle capte l’attention de l’éperon rocheux, par ailleurs un charmant et agréable village médiéval sis à 30 mn de l’aéroport international de Nice. Selon Fiona Beric de l’agence Riviera Estates Savills, les habitations orientées sur l’étendue marine évoluent entre 2 et 7 M €. Actuellement, on demande 6 M € pour une réalisation de Robert Dallas, le spécialiste de la néoprovençale : elle développe 460 m2 sur un terrain de 5100 m2 avec piscine, tennis et maison d’amis. Le « Domaine de Vignons » propose cinq villas de 275 m2, toujours construites par l’architecte, et des jardins de 2500 m2 face au littoral, à moins de 3 M €. Les baous de Vence remportent un réel succès pour des raisons similaires. « Sous le Château Saint-Martin, on découvre d’importantes unités jusqu’à 10 M € et plus. Anglo-Saxons et Scandinaves y expriment leur goût immodéré pour le mythe provençal, les vues époustouflantes et la tranquillité », révèle Olivier Morvan de Riviera Estates Savills. D’après le professionnel, le phénomène prend une ampleur considérable dans Les Haut de Saint-Paul, un domaine fermé de 200 villas implanté à proximité du Mas d’Artigny. La plupart, entre 3 et 25 M €, donne sur la ligne prise entre Monaco et l’Estérel. « De tous les quartiers niçois, le Mont-Boron, à un quart d’heure de l’aéroport, offre les plus intéressants panoramas azur », clame Benjamin Mondou de Lafage Century 21. 80 % des acheteurs sont anglais, irlandais, russes ou scandinaves. L’appartement se monnaie de 6000 à 10.000 €/m2. 2,5 M € constituent le minimum exigé pour une villa, une denrée susceptible de flirter, hors exception, avec les 10-12 M €. La vue arrive largement en tête dans la discussion, devant l’état, l’exposition, l’environnement sonore et le caractère historique du bâti. Elle englobe le port de plaisance, la colline du château, la Baie des Anges et les toits de la capitale azuréenne. Villefranche-sur-Mer, la cité limitrophe, se targue de posséder une rade tellement belle qu’elle ne connaît pas de rivale. « La partie supérieure du Domaine du Castellet, un ensemble d’environ 75 maisons, s’ouvre du Cap de Nice aux reliefs de l’Estérel, de la ville chère à Jean Cocteau au pic d’Èze. Une propriété de 400 m2 a récemment trouvé preneur à 7,9 M €. Entre la Basse- et la Moyenne-Corniche, le très résidentiel boulevard Settimelli-Lazare surplombe la plage et le centre. Un lot rénové, prolongé par une terrasse sur l’eau, coûte 8500-9000 €/m2. Le segment individuel frôle les 15.000 €/m2 », commente Sandrine Allari de Riviera Estates Savills. Thierry Petoin de l’agence Bristol désigne l’axe de la rade comme le secteur de prédilection des aficionados de paysages côtiers. Un appartement de trois pièces, soit 77 m2 sans aucun défaut, et son garage se sont échangés contre 11.500 €/m2. La vue mer vaut, en villa, de 10.000 à 20.000 €/m2, 15.000 €/m2 en moyenne, un chiffre synonyme d’excellentes prestations. Le spécialiste note une récente et légère défection des Britanniques, peu avantagés par le taux de change entre la livre et l’euro. Les séniors en raffolent : Beaulieu-sur-Mer, fort pratique grâce à sa configuration plate, renferme un patrimoine Belle Epoque unique. Tourné vers l’horizon, le boulevard Edouard-VII arbore des demeures jusqu’à 30 M €. Peu construite, La Petite Afrique compense les terrains réduits par le caractère pied dans l’eau. Russes et Saoudiens n’hésitent pas à payer, ici, 25 M €. Sur Beaulieu, la vue mer a sans doute moins d’importance qu’à Villefranche. Les acheteurs privilégient la proximité des commerces et l’esprit village. « On vient de vendre un appartement de 200 m2, dépourvu de perspective turquoise, dans une résidence Belle Epoque du centre, à 10.000 €/m2 et une villa, juste avec un aperçu, à 11.500 €/m2 », confie Thierry Petoin. En y devenant propriétaire, Bono, le chanteur des U2, contribue à la réputation d’Eze. « Ces cinq dernières années, le marché surfe sur la vague du succès », précise Sandrine Allari. Des maisons de 200-250 m2 s’arriment à la colline au-dessus du Cap Ferrat. Un produit restauré et fonctionnel quitte les agences moyennant 4,8 M €. Une bâtisse, directement accessible depuis la mer, est estimée à 27 M €. L’engouement pour Cap d’Ail ne repose pas seulement sur les ouvertures Méditerranée. La faible distance qui l’éloigne de Monaco entre pour beaucoup dans sa cote. Assez rares dans les fichiers, les appartements des collines vont de 8000 à 10.000 €/m2. Les villas sous la Basse-Corniche cristallisent une activité soutenue. On exige 30 M € pour une construction Belle Epoque de 600 m2, à revoir entièrement, et un parc en restanques. Tout aussi proche de la Principauté, Roquebrune-Cap-Martin immortalise superbement la rencontre des Alpes et de l’immensité marine. Les Italiens n’hésitent pas à investir à deux pas de la frontière. Le placement se situe entre 1,5 et 20 M €. 15 M e permettent d’emménager dans une demeure de 450 m2 au goût du jour, édifiée sur une parcelle plate. La vue mer reste capitale, mais pas suffisante pour emporter la mise. « Elle complète à merveille le caractère unique d’un bien, car, comme toujours, le haut de gamme azuréen, moins concerné par les ralentissements, tire son épingle du jeu », conclut Jean-Claude Caputo, le directeur général de Riviera Estates Savills.
Par Laetitia Rossi