Le Cap d’Antibes
Derrière celui du Cap Ferrat, son marché immobilier subit des mutations.
La péninsule antiboise démarre dans la baie de La Garoupe et se termine à Juan-les-Pins. A peine derrière celui du Cap Ferrat, son marché immobilier subit des mutations, mais ne connaît pas de ralentissement.
Difficile d’imaginer qu’en lieu et place de ce paradis végétal, la roche régnait jadis sans partage. Aurélien Monnier de l’Agence du Cap d’Antibes s’avoue intarissable sur le sujet : « James Wyllie apporte, à la fin du XIXe siècle, de la terre sur ce qui allait devenir le fief de la rose. Meilland, Leonetti, Astoux et Richardier se partagent l’espace. C’est à cette époque que fleurissent les premières demeures de maîtres, sous l’impulsion des Britanniques en villégiature. L’hôtel Eden Roc, considéré comme l’un des plus beaux du monde, ouvre ses portes en 1870. Quinze ans auparavant, le botaniste Thuret introduit sur la prestigieuse avancée des essences jusqu’alors inconnues comme le palmier et l’eucalyptus. La ville poursuit son extension et le port affirme sa vocation de plaisance. Juan-les-Pins amorce son développement en 1920, lequel s’intensifie dans les années 1950-1960. L’heure est aux pensionnaires américains et au jazz. Le cap fonctionne aujourd’hui à la manière d’un village, avec ses commerces et son école, et abrite entre 4000 et 5000 villas, souvent dédiées à la résidence secondaire.
Aurélien Monnier signale l’arrivée de clients échaudés par le niveau de prix élevé du Cap Ferrat. A Antibes, les acquéreurs se montrent exigeants et, sous la pression de la demande, les produits de qualité commencent à manquer. Le ticket d’entrée coûte 1 M € et donne droit à une petite maison sur un jardinet, privé de vue et de piscine. La transaction moyenne oscille entre 1,5 et 3 M € et correspond à 150-250 m2 (quatre chambres) sur 1500-2000 m2 avec un aperçu Méditerranée. Le haut du panier évolue entre 20 et 30 M €, voire au-delà, et équivaut à un parc de 1 à 2 ha avec piscine et tennis. Au nombre des somptueuses propriétés, figurent le Château de la Garoupe et son jardin de 13 ha, la Villa Aujourd’hui, construite par Mallet-Stevens pour John Warner, ou encore le Château de la Croë, qui a appartenu à Edouard VII et Onassis.
Si les habitants du Cap Ferrat misent sur la proximité de Monaco, ceux d’Antibes apprécient de se trouver à égale distance entre l’aéroport international de Nice et Cannes. Ils sont européens, anglo-saxons, issus des pays de l’est, brésiliens ou argentins. Ils préfèrent l’ouest à l’est de la péninsule. Ils rêvent de la Baie des Milliardaires, au sud, mais réalisent rapidement que la part de produits à la vente reste faible. Enfin, ils n’hésitent pas à se lancer dans des travaux de rénovation.
Marc Pradal de Pradal Immobilier décrit le très sélect micromarché compris entre l’Eden Roc et Les Belles Rives. Au sujet des prix, il ose même ce trait d’humour : « Depuis 2000, les valeurs sont restées identiques, sauf qu’on les annonçait en francs ». Il mentionne cette villa de 200 m2 sur 1100 m2, à deux pas de la mer et de la ville, vendue 15 M €. Il revient sur les Russes, leur propension aux grands domaines sis dans la Baie des Milliardaires, et aborde la percée, récente mais sérieuse, des Irlandais, séduits par les lignes aériennes directes entre Nice et leur pays d’origine. « Un pied dans l’eau édifié à cet endroit vaut le double que le même installé à Théoule-sur-Mer, 30 % de moins que sur le Cap Ferrat. Les deux péninsules sont à la Côte d’Azur ce que Les Parcs signifient pour Saint-Tropez. Quant à ces rares villas qui possèdent un accès direct à la mer, elles cristallisent les rêves et les fantasmes et ne subissent jamais les crises. »
Sébastien Jamoulle de JJC International insiste sur la pénurie. « Un client muni d’un budget de 4 M € ne visitera par exemple qu’une poignée de maisons. » La première vue mer, on l’obtient moyennant 3 M € (300 m2 à rafraîchir sur 1500 m2). A bien équivalent, il peut arriver que le prix double entre les secteurs est et ouest. On observe également quelques domaines, une configuration très en vogue à l’heure actuelle : le Parc Saramartel (avec 52 villas), Empel (environ dix unités), Le Cap (25), Eden du Cap (9), Les Chênes Verts (15), Les Hauts de la Garoupe (11), La Presqu’île du Cap (4)… La spéculation s’avère encore possible et les marchands de biens sont toujours présents. On cite, parmi d’autres, cette habitation de 160 m2 sur 1300 m2 au sein du Parc Saramartel à 2,4 M €, une maison qui est le fruit d’une rénovation réussie. Quant au foncier, la rareté frappe davantage encore. Aurélien Monnier évoque un terrain de 2000 m2, négocié à partir de 1,2 M €.
Dans le quartier, le collectif a connu un infime développement, sans doute à cause des mesures dissuasives du Plan d’Occupation des Sols. On construit une surface habitable égale à 10 % de la superficie totale du lot, sur une parcelle supérieure à 1500 m2,
et on ne dépasse pas sept mètres en hauteur. Sébastien Jamoulle note cependant quelques beaux ensembles : Aurélia Roc, Le Château de la Pinède ou Port Galice. Compter minimum 12.000 €/m2 pour un appartement en étage élevé avec vue mer. Actuellement, la dernière résidence citée fait état d’un deux-pièces de 83 m2, à 950.000 €.
La location saisonnière constitue enfin une source de revenu non négligeable. D’ailleurs, les acquéreurs demandent systématiquement la valeur locative des biens. « Leur mise à disposition permet de couvrir les coûts d’entretien, voire d’en tirer un bénéfice réellement conséquent », révèle encore Sébastien Jamoulle. Un pied dans l’eau de 200 m2 (comportant cinq chambres) avec piscine et 600 m2 de terrasse se loue 6500 € la semaine en haute saison. Une villa de sept chambres sur 1500 m2 part à 10.000 €. Le taux de remplissage avoisine les 50 % en juillet.
Par Laetitia Rossi - Photos Edith Andreotta