Le prestige des pieds dans l’eau
Elles représentent un micromarché et chacune reste unique. Les villas pieds dans l’eau sont des biens d’exception qui ont trouvé, dans le Var, un écrin à leur mesure… ou à leur démesure.
A tout seigneur, tout honneur, Saint-Tropez s’impose dans le top 5 des stations balnéaires de la planète. Les happy few s’y retrouvent dès les beaux jours et la cité vit alors vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Ce laboratoire de tendances en tous genres a accueilli des événements tels que le mariage de Mick Jagger en 1971 et plus récemment, en 2010, le défilé Chanel, coaché par Karl Lagerfeld himself. Mais les François Pinault, Vincent Bolloré, Stéphane Courbit et autres Kate Moss ou Marcel Dessailly ne sont que les héritiers des précurseurs qui ont découvert Saint-Tropez et lui ont donné ses lettres de noblesse. Parmi eux : Colette qui y acheta une maison, « La treille muscade » et s’extasia : « Rien n’est pareil à ce golfe, à ces terres heureuses, à leur verdure. Quel climat ! C’est un miracle ! » Le miracle perdure et cet Eden a gardé intact son pouvoir de séduction. Les plages de sable fin participent à la beauté du site et les villas pieds dans l’eau restent des fleurons du marché immobilier tropézien. Les véritables villas pieds dans l’eau, celles qui donnent directement sur une plage ou qui possèdent un sentier, plus ou moins chaotique permettant d’y accéder. Plusieurs secteurs se partagent le marché : « Les Parcs de Saint-Tropez », Tahiti, Pampelonne, les Graniers et L’Escalet. Située entre 10 et 30 M €, voire beaucoup plus, la fourchette de prix pour ces produits atypiques est extensible… quasiment à l’infini.
« Le marché de la villa pieds dans l’eau est comparable à celui de l’art », explique Alex Filippini d’Alex Agency. « On ne peut pas tout rationnaliser mais en règle générale, l’acquéreur est un amoureux de la mer qui est, la plupart du temps, également propriétaire d’un bateau. » Dans « Les Parcs de Saint-Tropez », domaine privé et sécurisé très prestigieux sis à une dizaine de mètres au dessus de la Grande Bleue, on rejoint la plage par un sentier littoral. Il faut compter minimum 20 M € pour un produit avec des travaux à réaliser. « Sur ce secteur, la moyenne de prix se situe aux alentours de 30 M € », précise Pia Frei de Saint-Tropez Home Finders. Sur Tahiti, on trouve le domaine « Capilla » où l’ex-mari de Brigitte Bardot posséda une maison. Ici, on démarre à 17 M €. Mais pour une propriété en position dominante, sur une belle parcelle d’une vingtaine d’hectares, avec une maison principale, une maison d’amis et une autre de gardien, mieux vaut prévoir 50 M €. Aux Graniers, au pied du versant sud de la citadelle, place à l’esprit naturel et sauvage. L’espace abrite quelques beaux exemples de pieds dans l’eau. A l’image de cette propriété qui regarde le golfe de Saint-Tropez et offre, moyennant 23 M €, une maison de maître d’environ 370 m2, une maison de gardien de 80 m2, des prestations très haut de gamme, le tout sur 3580 m2 arborés et paysagés. A Pampelonne, une villa de 250 m2 à rénover, sur un hectare de terrain et avec un aperçu mer, se négocie entre 10 et 15 M €. Reste la plage de l’Escalet, protégée par le Conservatoire du Littoral et qui affiche des prix un peu plus bas. L’adresse compte surtout des villas en colline et les rares pieds dans l’eau ne sont pas à la vente. Sur Saint-Tropez, les professionnels sont unanimes : les villas pieds dans l’eau s’affranchissent des règles élémentaires et ne se vendent pas dans un délai très court. Entrent bien sûr en jeu l’emplacement, la vue mer ou non, la plage privée ou l’accès à la plage, les éventuels travaux… Le côté émotionnel reste très fort. Si pour un autre bien, le turn over s’avère important - le propriétaire ne garde son acquisition que 6 ans en moyenne - l’attachement à une villa pieds dans l’eau se révèle plus fort et plus durable. Le client a du choix et pour ce secteur, le coup de cœur existe toujours. Schématiquement, l’acheteur est français à 30 ou 40 % et il appartient au monde des affaires, de la mode, du showbizz ; donc parisien dans sa grande majorité. Lorsqu’il est étranger, il vient surtout d’Europe du Nord ; à noter, Saint-Tropez accueille à nouveau des Anglais, un temps en délicatesse avec leur monnaie et qui avaient quelque peu déserté l’endroit.
Toujours dans le Var, entre Cassis et Sainte-Maxime, l’offre existe, avec un même constat : la demande la supplante. Apparemment pour les mêmes raisons ; les propriétaires gardent volontiers leur bien. « Une propriété pieds dans l’eau exposée plein sud avec une belle vue mer aura une vraie valeur », déclare Ghislaine Faure de l’agence du Regard. Et sur ces deux communes également, les prix peuvent flamber et atteindre plusieurs millions d’euros, sans toutefois battre les records tropéziens. Car il faut bien se rendre à l’évidence, plus on se rapproche de la mythique Saint-Tropez, plus les chiffres grimpent. Moins médiatique que la ville où fut tourné « Et Dieu créa la femme », les autres cités privilégient la confidentialité et une certaine authenticité. Ainsi, à Sanary, une villa pieds dans l’eau de style contemporain, exposée ouest, avec piscine et accès direct à une crique attend preneur à 2.100.000 €. Lorsque les prix semblent bas, de l’ordre d’1 M €, voire 1.500.000 €, c’est qu’il faut envisager d’importants travaux, de l’ordre de 700.000 €. Les biens d’exception qui appellent tous les superlatifs, s’ils sont assez rares, existent pourtant. A l’image de cette propriété au Pradet à 35 M € ; une demeure du XIXe siècle de 1000 m2 habitables présentant une fort belle architecture et des prestations très élevées, avec un accès à sa crique et sa caverne en bord de mer emménagée en vestiaire. Restent les cabanons de pêcheurs, eux aussi les pieds dans l’eau. Leur valeur tient à leur nombre restreint, car on n’en construit plus aujourd’hui. Pour acquérir 20 à 45 m2 habitables, sans fenêtre donnant sur l’extérieur, il faut compter pas moins de 500.000 € et être prêt à engager des travaux pour le rendre habitable et optimiser au maximum l’espace. A la clé, un tout petit pied-à-terre en bord de Méditerranée, au charme inversement proportionnel à la superficie.
Résidences secondaires à 100 %, les habitations pieds dans l’eau n’accueillent bien souvent leur propriétaire qu’un mois par an. C’est l’achat lié à l’impulsion par excellence. Celui qui est motivé par le besoin de voir son bateau amarré face à sa maison, par l’envie de cumuler les joies de la mer au bien-être de la terre. Dans un cadre idyllique et unique si possible. Très peu de propriétaires louent ce type de biens. S’ils s’y résolvent, c’est en moyenne contre 25.000-30.000 € par semaine. Mais là encore, difficile de donner une fourchette de prix. La villa pieds dans l’eau demeure un produit qui se négocie au cas par cas.