Les caps du 06 et du 83
Les Alpes-Maritimes et le Var ont pour eux une façade maritime de toute beauté desservie, entre autres, par un dynamique aéroport international. Les caps restent l’expression la plus aboutie d’un art de vivre sur la Côte d’Azur. Ferrat, Antibes et la presqu’île de Saint-Tropez rayonnent dans le monde entier.
Bien avant son indépendance en 1904, le Cap Ferrat est aussi reconnu et sélect que Cannes, attirant le gotha comme l’intelligentsia internationale. Les Russes ouvrent le bal, suivis par les Britanniques. La descendance de la Reine Victoria s’y promène, à l’instar d’Hélène de Serbie, de la souveraine de Roumanie, de l’impératrice Eugénie ou d’Elisabeth d’Autriche. Nietzsche et Apollinaire ne dissimulent plus leur attachement, tandis que Léopold II Roi des Belges s’offre une bonne partie de l’ouest, dont « Le Domaine des Cèdres », « La Radiana » ou une bâtisse acquise ensuite par Estée Lauder. Romy Schneider épouse le réalisateur allemand Harry Haubenstock à la mairie de Saint-Jean. Edifiée sur la très recherchée Pointe Saint-Hospice, « La Fiorentina » séduit les Kennedy, Elisabeth Taylor, Greta Garbo ou Somerset Maugham. Vincent Auriol, Charlie Chaplin et David Niven préfèrent le pied dans l’eau « Fleur du Cap », lorsque Paul Allen habite « Maryland ». Le Cap d’Antibes démarre à la Garoupe pour terminer sa course à Juan-les-Pins, le quartier balnéaire de la deuxième ville du département. Difficile d’imaginer que sans l’intervention, à la fin du XIXe siècle, de James Wyllie, désireux d’y introduire la rose, il ne serait encore qu’un amas de roches sans grand intérêt. Meilland, Leonetti, Astoux et Richardier cultivent le végétal avec succès. Le botaniste Thuret plante palmiers et eucalyptus. Les Anglo-Saxons élèvent de belles villas. En 1870, le prestigieux hôtel Eden Roc voit le jour. Dès les années 1920, les jazzmen affluent. Après la Seconde Guerre Mondiale, de somptueuses propriétés remplacent les serres. Au cours de la dernière décennie, les Russes manifestent, en ces lieux, leur penchant historique pour la Côte d’Azur. La péninsule abrite, aujourd’hui, entre 4000 et 5000 maisons. Artistes, personnalités du show-biz ou du sport, industriels et communicants de la planète fréquentent la presqu’île de Saint-Tropez. Etablissements et soirées branchés défraient la chronique dans la presse people, n’altérant jamais la qualité de vie au sein de l’authentique village varois, découvert par Signac, Bonnard, Marquet, Picabia et Matisse, révélé au grand public par Brigitte Bardot et adulé par la Nouvelle Vague, les Yé-yés et tout ce que le monde compte de célébrités depuis. La qualité des infrastructures n’a d’égal que la beauté de l’environnement naturel, des plages de Pampelonne aux terres viticoles, du port coloré de Saint-Tropez aux bourgs perchés de Gassin et de Ramatuelle. « Avec ses 250 ha et ses règles d’urbanisme sévères, le Cap Ferrat s’inscrit, sans doute, comme la plus exclusive des trois adresses. L’aéroport se trouve à 30 mn, Nice et Monaco, à 15 mn seulement. Cela fait quelques années que les pouvoirs publics mettent l’accent sur la sécurité, un critère récurrent dans le discours de la clientèle », décrit Jean-François Dietrich de l’Agence du Littoral. Si le minimum requis pour obtenir un droit à bâtir équivaut à 1500 m2, il existe encore des zones à 10.000 et à 20.000 m2. Fort de 140.000 m2 de jardin à son actif, « Le Domaine des Cèdres » bat tous les records. Les prix sont élevés et le terrain constitue une valeur fondamentale, au même titre que le panorama Méditerranée. La moindre maison de 150 m2 à embellir, sur une parcelle sans vue de 1500 m2, débute à 2-2,5 M €. Sur les seize derniers mois, le nombre de transactions chute de 50 %. Une deuxième vague d’Européens de l’Est achète des propriétés familiales, orientées sur la Grande Bleue et situées entre 5 et 15 M €, exigeant systématiquement une correction de tarifs de l’ordre de 20 %. La Livre Sterling et le Dollar sont toujours trop faibles pour envisager le retour des Anglais et des Américains. Même si le professionnel reçoit déjà quelques demandes via le Net, Pâques devrait être révélateur quant à l’exercice 2010. L’été 2009 demeure un bon cru en termes de location saisonnière sans que l’on verse dans l’euphorie. Hétéroclite à souhait, le parc immobilier se négocie de 10.000 à 150.000 € le mois de juillet ou d’août. Bien souvent, ce type d’occupation, comme le séjour au Grand Hôtel du Cap, à La Voile d’Or ou au Royal Riviera, est un tremplin avant l’acquisition. « Pendant la crise, les vendeurs antibois annoncent clairement la couleur : ils obtiennent plus ou moins la somme exigée ou retirent leur bien des fichiers », note Aurélien Monnier de l’Agence du Cap d’Antibes. Résultat des courses : un premier semestre calme et des propositions sans lendemain 30-40 % sous les valeurs affichées. Plus active, la seconde moitié de l’année trouve une compensation dans la location et quelques affaires conclues aux montants observés en 2008 amputés de 20-25 %. L’essentiel des actes, signés par des Français ou des Italiens, évolue entre 1 et 4 M €, une enveloppe autorisant 150-200 m2 habitables sur 1500 m2 à rénover ou en état correct. Le spécialiste avoue quelques rares incursions, faute de « bons produits », entre 4 et 6 M €. Si, comme sur Ferrat, la sécurité de l’investissement ne fait aucun doute, la grille tarifaire est moins élevée de 20-30 %, un différentiel tenant essentiellement à l’aspect plus loti du Cap d’Antibes. « Saint-Tropez se distingue surtout par sa clientèle, si particulière », poursuit François Michel de l’Agence Emile Garcin. Tout aussi internationale, elle habite sur place deux à trois mois par an et plutôt en été, soit une période bien plus courte que les rythmes enregistrés dans le 06. Agée en moyenne de 35 ans et enrichie récemment par Internet ou la communication, elle apprécie le cocktail détonnant de fête et de nature, de divertissement et de sérénité. Sensibles à l’esprit village, l’immense atout de la presqu’île varoise, les Européens du Nord côtoient des ressortissants des Pays de l’Est, certes moins nombreux que par le passé, et recherchent la fonctionnalité quasi immédiate. L’affect est très présent dans la prise de décision, la notion d’investissement, moins prononcée. Le budget moyen oscille de 5 à 10 M €. A 5 M €, on aperçoit l’immensité azur, à 7 M €, on la voit, à 10 M €, elle s’invite franchement dans le décor. En 2008 et 2009, les prix, qui avaient atteint des paliers artificiels, se sont logiquement réajustés. Et le beau a trouvé preneur. D’ailleurs, Emile Garcin évoque, sans complexe, un maintien du chiffre d’affaires. Au fil des mois, le marché se recentre sur le produit sans nuisance. A moins de colossaux efforts à la baisse de la part des vendeurs, la médiocrité ou la prestation approximative n’a plus droit de cité. Certains acheteurs prêts à injecter 2-4 M € renoncent à leur projet tropézien, conscients d’accéder, pour une mise identique, à un bel objet sur Giens ou le Cap Bénat, un site qui remporte un franc succès auprès des Hexagonaux.
Par Laetitia Rossi.
